CAïD
Encor pleuvent cailloux lourds,
Et aussi prétentieux silences et la cruauté sainte-nitouche,
Et les larmiches de vie qui se rêvent bourrasques,
D'un pieu qu'on enfonce dans la plaie sale, cœur de vampire,
Y a des gangrènes qui creusent, qui sentent l'ail et qui creusent et qui se nichent,
Quelque part,
A l'ombre des réverbères aux éclats sédatifs,
Elles sont comme des détectives en filature, qu'on voit par la fenêtre,
Elles font semblant de lire le journal,
Ou comme un amant jaloux qui serre un flingue dans sa poche
Et nous mourons encor
Encor sous les drapeaux virevoltants des foules qu'on achète,
ça se maquille,
ça s'arrose, innocence
ça arrose tant bien que mal des fleurs carnivores,
Elles renaissent toujours et toujours, dans les bouquets, dans les vases, ça sent bon
Et nous oublions encor
Encor sur les vitrines léchées se dorent la salive mélangée du peuple uni et beau
Comme un baiser par procuration
Encor sur du verre brisé s'endorment ivres mortes les carcasses oubliées du cortège univoque
Et nous voguons encor
Encor dans des terrains vagues, le précipice des tours et les nuages comme leurs cheveux
Encor l'univers à portée de main, dit la bulle dans l'avion qui perce les crinières,
Encor, à portée de portefeuilles bien fermés près du cœur que je n'ouvrirai rien que pour ton cul,
Et nous bandons encor,
Encor comme un monstre qui jaillit et recrache sur ta gueule ton or noir béni,
Et nous rampons encor,
Encor la carcasse sniffe la poussière dans les bas fonds de mémoire où se sont égrainées des pincées d'instants de sable et dans le fond des verres, le pétillant des bulles,
Encor la carapace durcit comme la corne sous le pied,
Suis caïd encor.