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Episode 6

COMMENT QUAND ON VEUT, ON PEUT

Du Ciel et de la Terre 3_10

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Impénitents peinés par un piètre apanage,

Ils sont alors témoins d'un loufoque mirage:

Un arbre immatériel apparaît aux amants.

Son feuillage se meut dans les à-coups du vent.

Il a grandi ainsi, dans le creux d'un instant

Puis bourgeonne, fleurit, fructifie brusquement.

Au miracle, elle crie:

                              " Des pommes, mon lapin !

Je n'en crois pas mes yeux !

                                      - Des yeux, tu n'en as point,

C'est encore du toc ! Ils vont nous rendre fous !

Les pommes, c'est sur terre et ici, rien du tout !"

Ces visions, au gueux, n'inspirent rien qui vaillent:

"J'ai vu ça quelque-part mais j'oublie les détails..."

Le loubard est inquiet:

                               " Simone, sois prudente !"

Mais la gueuse n'entend que la langue pendante

De son âme pâmée devant les rouges fruits

Dont l'éclat n'a d'égal que leurs deux appétits.

Bernard reste à l'écart:

                                    " Ce n'est pas catholique,

Je flaire le pépin, on dirait du pastique.

N'as-tu pas lu Blanch' !neig quand tu étais petite ?

- Si un prince charmant peut venir tout de suite

Me ram'ner à la vie en un fougueux baiser !"

A cette réflexion, le jaloux est vexé:

"Regarde la couleur ! Sûr ! C'est des OGM !

Ecoute-moi, bon sang !" ( Entrendre "si tu m'aimes.")

Mais la donzelle est morte avant qu'on ne repique

Première graine d'un légume transgénique:

" Je suis devant les fruits et eux, sont devant moi..."

Une vois l'interrompt:

                                " T'as raison ! Lâche-toi !

- Qui parle ? Qui dit-ça ? D'où ce timbre vient-il ?

Mon nanard, c'est blague est carrément débile !

- Je te jure: je n'ai guère bougé d'un cil !

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Nos anges se sont tus, perplexes, imbéciles.

Un serpent se fait voir, ondulant dans les branches,

Dansant à ambiancer Simone qui s'y penche.

" Fais attention, ma mie ! Il en est vénéneux !"

Mais vain est le discours du farouche amoureux.

Qu'importe le venin si la piqûre tente:

L'allure de ses pommes est si appétissante

( Jamais, de son vivant, elle n'en vit pareille)

Qu'elle n'entend pas ça de similaire oreille.

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" Goûte, goûte, jolie Simone

C'est ton désir qui te sermonne.

Dieu rend ton âme vulnérable ?

Laisse-toi tenter par le diable !

Quand la pomme fait saliver,

Songe déjà à la bouchée

Qui s'invite au palais, crépite,  

Ne résiste pas et profite..." 

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La fièvre prend Bernard en suée de son âme

Comme si le loubard pressentait quelque drame.

" N'entends-tu pas, Simone, à son nombre de pied 

Qu'il n'a ici sa place et qu'il est étranger...

- Avec les pieds, serpent à toujours la vie dure

Et je découvre enfin ta mauvaise nature !

- Etranger à l'histoire ! Arrête tes sornettes !

- Je ne vois pas pourquoi un serpent à sonnette

Ne s'exprimerait pas tout comme il le souhaite

Et puis l'octosyllabe n'est pas moins obsolète;

On ne va pas blâmer pardi 

Le changement de mélodie.

N'ayons pas le pattern austère !

Il est si bon de changer d'air,

Ça met du frais dans les oreilles...

-  Ma Simone, voilà que tu parles pareil !"

S'épouvante Bernard qui, aussitôt, perd pied

Comme un enfant hurlant devant une araignée,

Il implore à genoux: 

                                  "Délivre-la du mal

Résiste aux tentations !"

                                       Que nenni ! Peau de balle !

A dents pleines, babines léchées par la langue

De vipère et se languissant, mauvaise langue

Du retour en matière, elle conçoit la pomme

Et la désire tant que du fond du fantôme

S'extraient des crocs escrocs qui craquent goulûment. 

" Ma cocotte, dis-moi, alors ? Elle est comment ?"

Étendant l'âme encore, elle en attrape une autre

Et la tend au loubard, exhumant langue morte... 

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DU CIEL ET DE LA TERRE ( ET A QUI LES REMUE )

un conte de l'errance cruelle

DU CIEL ET DE LA TERRE ( ET A QUI LES REMUE) 

un conte de l'errance cruelle

Ed Les Venterniers( 2015 )

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